Le premier tome de la trilogie Le Livre et l’Épée sort aujourd’hui. Comme vous le savez, nous fêtons l’événement de bien des façons. Ici, en publiant l’interview qu’Antoine a bien voulu nous accorder, au bout de deux ans de travail…

Pour information, l’entretien en question est la version longue de celui présent dans le dernier numéro de Neverland. C’est parti !

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À l’heure où ces questions te sont envoyées, le livre n’a pas encore été publié. Qu’est ce qui a déjà changé pour toi ?

1234125_468575306574058_980388525_nBeaucoup de choses. Et peu de choses en même temps. C'est très paradoxal, mais je ne suis que dans l'attente pour le moment, ça ne me paraît pas encore concret. Cependant, l'idée d'être publié, et d'être surtout soutenu ainsi par Bragelonne, m'a permis de repenser ma façon d'écrire, d'envisager l'avenir différemment. Les corrections effectuées entre le premier jet et le dernier m'ont appris à reconsidérer mon écriture, à repenser quelques intrigues.

Je me sens « porté ». Je ne considère pas la publication de ce premier tome comme une réussite, quelque chose de fini, non, mais bien comme un début. Alors que je tournais en rond avec certains projets, ne sachant pas si, un jour, j’arriverais à partager mes histoires avec le plus grand nombre, penser que mon livre va se retrouver en librairie, et pas qu’en France, me booste plus que ça ne me freine. Je n’ai qu’une envie : faire de mieux en mieux.

Statistiquement, avec cette sortie internationale (voir ici), tu vas toucher plusieurs milliers de lecteurs de plus que n’importe quel autre écrivain francophone… pression ou pas pression ?

Pression, c’est évident. Mais en essayant de voir les choses autrement, c’est un peu ce que recherche tout écrivain, non ? Être lu.

Couverture allemande de La Voie de la Colère

Quel est ton plus ancien souvenir en rapport avec l’imaginaire ? 

E.T.. J'avais 3 ans. Il y a un amour inconditionnel pour ce film. En Fantasy, c'était d'abord le cinéma avec Willow. Et ensuite Bilbo le Hobbit et bien sûr Le Seigneur des Anneaux. Après, je ne suis pas un grand lecteur de Fantasy. Aucun rapport avec le genre, ce n'est pas la question. Je choisis juste des histoires qui attisent ma curiosité, peu importe qu'elle soit un polar, un récit épique, infinitiste etc...

Et j'ai eu, comme beaucoup dans les années 90, ma période jeu de rôle. Là, ça débordait au niveau de l'imaginaire.

Comment Dun-Cadal, Grenouille et les autres sont-ils nés ? Quand t’es-tu dit que tu tenais une bonne histoire ?

Dun-Cadal était, il y a longtemps, un roi Elvereth, un haut-elfe. Un roi fou, possédé par un démon... bref, une histoire écrite à l’âge de 16-17 ans. Mais j’étais tellement content de ce nom que je l’ai repris pour Le Livre et l’Épée. Ça collait bien avec le personnage de vieux général, un nom un peu antique. L’histoire, dans les grandes lignes, est venue en une soirée. Plein d’idées fusaient, je les écrivais, je visualisais de grands moments etc. Et petit à petit, en écrivant, j’ai affiné ce côté brut.

Je ne me suis jamais dit que je tenais une bonne histoire, j’essayais juste de la rendre bonne, de retrouver des ressentis que j’avais pu avoir en voyant des films épiques, en lisant des récits, ce côté enfantin de se laisser emporter dans une épopée. Et puis, au début, je l’écrivais à destination d’un public adolescent. Toute la structure, comme le fond, sont basés sur cette idée : raconter ce que c’est que de devenir adulte. Au fur et à mesure, j’ai ajouté d’autres idées... mais si j’en dis trop, je risque de spoiler.

Couverture anglaise de La Voie de la Colère

Question à la con : qu’est ce qui a contribué à forger cet univers ? T’es-tu laissé influencé par des auteurs ou des œuvres diverses ?

Les tragédies antiques, les pièces de Shakespeare. J'avais cette volonté d'écrire quelque chose de tragique et en même temps héroïque. Loin de moi l'idée d'être arriver au même niveau bien évidemment, mais c'est ce qui, au début, m'a le plus influencé. Comme je ne lisais plus beaucoup de Fantasy, que je ne connaissais même pas Le Trône de fer, je partais sur des bases vierges, sans aucune envie de faire dans tel ou tel style à la mode. Non. C'était simplement la Tragédie.

Avais-tu une volonté particulière en racontant cette histoire ? L’envie de transmettre un message, consciemment ou non ? 

Oui, comme dit plus haut, au départ, c’était une sorte de vision très imagée de l’adolescence, d’un changement de statut, d’une recherche de soi. L’Empire avec ses codes rigides, sa gloire, mais également ses écarts, laissent place à une République qui cherche à trouver sa voie, à devenir « solide et confiante ».

On se forge une identité au contact des autres. La transmission est importante, qu’elle soit filiale ou amicale : c’est l’échange qui fait que l’on devient ce qu’on est. Grenouille se nourrit de son mentor.

Mais si Dun-Cadal lui donne des bases, ce sont les autres personnes qu’il rencontre, amicales ou ennemies, qui font qu’il évolue. Et puis, c’est aussi dans cette période-là qu’on se pose beaucoup de questions sur le rapport au destin, au sens de la vie, qui sommes-nous, pourquoi etc. Et la prédestination semble souvent revenir quand on se raccroche à cette idée que de toute façon, c’était écrit...

De même, la narration est une image du souvenir. Quand on se remémore quelque chose, ce n’est pas forcément dans un ordre très bien établi, c’est une succession logique d’idées. Il en est de même dans ma façon de raconter. Un puzzle qui n’est pas éclaté au hasard : tous les éléments sont placés ainsi par volonté.

Il y a plein de petites idées distillées ici et là, non pour asséner des vérités, je ne les possède pas, mais plutôt pour poser des questions. Elles feront sens à la fin de la trilogie, car certaines méritent encore d'être développées.

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La Voie de la Colère est maintenant disponible en librairie. Youpi !

Le Livre et l'Épée #1 : La Voie de la Colère d'Antoine Rouaud

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