Voici la seconde partie de l’interview de Ken Scholes, qui conclut donc cette semaine spéciale entourant son premier roman.
Si hier l’auteur américain évoquait son parcours, ses goûts littéraires et son rapport au genre, il explore ici plus en profondeur son premier livre. Rassurez-vous, pas de spoilers particuliers à l’horizon.
Bonne fin de lecture et rendez-vous en librairie le 21 mai !

D’où vous est venu le pitch de Lamentation, ou plutôt de la nouvelle ayant donné naissance au livre ?
Un magazine sortait un numéro spécialement consacré aux bizarreries mécaniques et la rédaction avait besoin de nouvelles. Je décidai de tenter le coup, et profitai de mes pauses-déjeuner pour écrire Of Metal Men and Scarlet Thread and Dancing with the Sunrise avec le personnage d'Isaak comme bizarrerie. Je n’ai même pas eu besoin de trop me creuser la tête, l’histoire m’est venue comme ça. Au début, je n’étais pas très satisfait du résultat. De plus, le magazine a clos les envois avant même que je puisse lui envoyer quoi que ce soit. Mais je l’ai envoyé ailleurs et un autre magazine, Realms of Fantasy, me l’a acheté. J’étais stupéfait en découvrant l’illustration choisie pour mon histoire. Je compris alors que mon récit était plus riche que je le pensais. J’ai donc décidé d’écrire quatre autres nouvelles. La seconde fut rejetée, mais ma femme et Jay Lake, mon meilleur ami, me mirent au défi d’en tirer un roman. Je relevai le défi et écrivis Lamentation en six semaines et demie de pure frénésie.
Isaak, justement, est clairement un personnage sortant des sentiers battus, pour un livre de Fantasy. Pouvez-vous nous le présenter ?
Isaak est un serviteur mécanique Androfrancien. Un androïde à vapeur travaillant pour l’Ordre de la Grande Bibliothèque. Malheureusement pour lui, il devient un pion dans un jeu terrible et se retrouve propulsé dans un univers qui n’est pas le sien. Je n’avais aucune idée de l’importance d’Isaak en le créant. Mais en contemplant le dessin d’Allen Douglas montrant Isaak pleurant au fond du cratère après l’explosion de Windwir (voir l'illustration en question), je dus moi-même retenir mes larmes et compris que mon histoire était bien plus profonde que je le pensais.
Passons à Rudofo. Sans être le personnage central du livre, il se démarque par sa complexité : il est tout autant un souverain délicat et raffiné qu’un chef de guerre impitoyable. Que vouliez-vous faire de lui ?
Je considère les Psaumes d’Isaak comme un ensemble d’histoires tournant plus ou moins autour de Rudolfo. Bien entendu, Isaak demeure le personnage principal de l’histoire, même si l’on ne voit jamais les choses selon son point de vue. Dans le cas de Rudolfo, je voulais présenter un homme transformé en meneur charismatique à travers une tragédie et passant sa vie persuadé que ces tragédies sont le fruit du hasard avant de découvrir que de sombres desseins se cachent derrière ces événements, le tout aboutissant à la chute de Windwir et l’essor de quelque chose de différent dans les Terres Nommées.
Les personnages pensent autant au passé et au futur. Il y a cette idée constante de changements…
Oui, c'est la devise de P'Andro Whym : le changement va de paire avec la vie. Ce qui est une manière plus amusante de dire : l’évolution suit son cours. D’ailleurs, le thème principal du livre est la façon dont la chute de Windwir a affecté la vie des personnages. Je crois que nous pensons tous beaucoup au passé comme au futur, à contempler ce que nous avons modifié et ce qui est amené à changer. Et même dans les meilleures conditions, le changement est un processus difficile. Les événements de Windwir entraînent une cascades d’altérations pour Rudolfo, Jin Li Tam, Petronus, Neb , Isaak...et plus tard Winters, Vlad Li Tam. Ils ont d’ailleurs bien du mal à suivre le rythme de l’action.
La technologie a une certaine importance dans le livre, ce qui est assez rare dans un roman de Fantasy. Est-ce une envie d’insuffler un brin de science-fiction à ce cycle ?
Je crois qu’il est important de noter que, du point de vue de mes personnages, ils vivent dans un roman de Fantasy dont l’histoire devient une épopée extraordinaire. Quoiqu’il en soit, la réalité n’est pas toujours en accord avec la perception.
Sans déflorer le contenu de Lamentation, pouvez-nous nous dire à quoi les lecteurs peuvent s’attendre dans la suite des Psaumes d’Isaak ?
Canticle commence par le Festin de la Nativité célébrant la naissance du premier enfant d’un des personnages. Tout ne se passe pas aussi bien que prévu jusqu’au moment où un mystérieux homme de métal se présente à eux. Il apporte un message d’un ami qui s’était exilé. Le deuxième tome explore plus en détail la destruction de Windwir et des forces se cachant derrière cet événement. Antiphon, que je viens de finir, apporte encore plus de détails sur cette destruction, mais aussi son lot de révélations surprenantes. Je travaille sur Requiem en ce moment, puis je continuerai sur ma lancée en m’attaquant à Hymne qui achèvera la série. J’ai hâte de voir comment les lecteurs français réagiront en lisant mes romans !